Deezer, l'un des leaders mondiaux du streaming musical, a récemment fait sensation en annonçant un changement majeur dans son système de rémunération des artistes. Cette décision, fruit d'un partenariat avec Universal Music Group (UMG), vise à instaurer un modèle de rétribution plus équitable et centré sur les artistes. Cependant, cette initiative n'a pas manqué de susciter des débats passionnés au sein de l'industrie musicale.Deezer a introduit des spécificités notables dans son nouveau modèle de rémunération, visant à récompenser davantage les artistes émergents. L'une de ces particularités est le "double boost" attribué aux titres qui génèrent au moins 1000 streams provenant d'au moins 500 auditeurs distincts.LE NOUVEAU SYSTÈME EST UN MODÈLE EN 4 POINTS :1. Doubler les rémunérations des artistes qui obtiennent au moins 1 000 écoutes mensuelles de la part d'au moins 500 auditeurs uniques.2. Doubler la rémunération des chansons avec lesquelles les fans s'engagent activement.3. Le contenu sonore non artistique (bruit blanc, sons de vagues, etc.) ne sera pas pris en compte dans le calcul des redevances.4. Enfin, Deezer promet de mettre en place un système de détection des fraudes plus strict afin de repérer et d'éliminer ceux qui tentent de contourner le système.UMG et Deezer justifient ce changement en mettant en avant leur engagement en faveur d'une industrie musicale plus équitable. Ils espèrent ainsi réduire les inégalités de revenus entre les artistes, un problème qui a longtemps fait l'objet de critiques dans le monde du streaming. Et malgré de nombreuses propositions des intervenants du secteur, rien a changé. Toutefois, Deezer a toujours été porteur d’innovation et montre aujourd’hui son envie d’être un acteur précurseur dans le streaming, en mettant à l'épreuve ce modèle alternatif directement sur leur plateforme. Cependant, cette initiative n'a pas été accueillie de manière unanime.LES RÉACTIONS DE L'INDUSTRIE À LA PROPOSITION DE DEEZER ET UMGAssociation of Independent Music : « Bien qu'il y ait de nombreux points positifs à retenir (…) l'augmentation des redevances pour les artistes qui atteignent certains seuils de consommation pourrait encourager un "système à deux vitesses" qui désavantagerait ceux qui commencent leur carrière ou qui travaillent dans des genres émergents. »Believe : « Nous nous opposons fermement à un système (..) qui consisterait à prélever des rémunérations sur les artistes en pleine ascension pour les allouer aux artistes les plus connus et les mieux établis. En outre, nous sommes convaincus, sur la base de données, qu'un tel système réduirait la diversité et découragerait la créativité. »Impala : « Le fait que la proposition de Deezer ait été élaborée avec le leader du marché au lieu du secteur en général est également préoccupant. À moins que d'autres parties prenantes ne soient d'accord, Impala ne voit pas comment elle pourrait s'appliquer en dehors du répertoire d'UMG. »Notons quand même que la société Warner Music Group fait partie de la même famille d'entreprises que Deezer. Selon MBW, le fondateur d'Access Industries, Len Blavatnik, contrôlait un peu plus de 73 % des actions de WMG au début de l'année 2023, tandis que même après l'entrée en bourse de Deezer, Access Industries détenait près de 37 % de ses actions. Ce qui, soit dit en passant, est une sous-intrigue amusante dans la décision de Deezer de modifier le modèle de paiement du streaming avec Universal Music Group en premier lieu.LA RÉPONSE DE DEEZER AUX PRÉOCCUPATIONS SOULEVÉES PAR LES ACTEURS DE L'INDUSTRIE MUSICALEÀ cela, Deezer a répondu en interview : "Si un artiste n'atteint pas 1 000 streams et 500 auditeurs par mois, il ne peut pas gagner sa vie, quelle que soit la rémunération du modèle. Il n'est donc pas techniquement un professionnel. Et tout artiste en devenir qui monte atteint ces niveaux assez rapidement."L'interview contient également des détails très intéressants sur la manière dont Deezer calculera son pool de redevances centré sur l'artiste. Seuls 1 000 streams par utilisateur et par mois seront pris en compte dans ce calcul."Ainsi, si vous écoutez 2 000 streams, vos streams compteront pour moitié. De cette façon, il n'y a pas de compte qui accumule 10 000 streams et qui vole de l'argent au pool", a déclaré M. Folgueira."Un être humain normal consomme entre 400 et 600 titres par mois, c'est pourquoi nous avons fixé le seuil à 1 000. À 1 000, plus de 90 % des comportements sont pris en compte, et seuls les comportements aberrants dépassent ce seuil..."Deezer a répondu à ces critiques en affirmant que les artistes établis continueraient à gagner des sommes considérables grâce aux concerts, aux ventes physiques et aux accords de licences. Ils insistent sur le fait que le streaming est principalement un moyen de découverte pour les artistes émergents, et que le nouveau système vise à soutenir cette phase critique de leur carrière.CONCLUSIONEn fin de compte, le nouveau système de rémunération du streaming chez Deezer suscite des réactions mitigées au sein de l'industrie musicale. Alors que certains saluent cette tentative de réduire les inégalités, d'autres expriment des inquiétudes quant à ses répercussions sur les artistes établis et sur la créativité artistique. Il est clair que ce débat est loin d'être clos, et l'avenir dira si ce modèle de rétribution sera un succès ou s'il nécessitera des ajustements pour parvenir à un équilibre optimal entre les artistes émergents et les vedettes de l'industrie musicale. La mise en place du système s’appliquera progressivement à tout le catalogue à partir du 1er octobre 2023.